Au fil de l’eau, carnet n° 7 – De Salvador de Bahia à Cayenne – avril/mai 2019

Au fil de l’eau, carnet n° 7 – De Salvador de Bahia à Cayenne – avril/mai 2019

« Jamais je n’ai tant pensé, tant existé, tant vécu, tant été moi-même, si j’ose ainsi dire, que dans les voyages que j’ai faits seul ou à pied. » Jean-Jacques Rousseau

TRAVERSEE SALVADOR DE BAHIA – JACARE / JOAO PESSOA – BRESIL – 500 milles nautiques

Jeudi 04 avril 2019 – Jour de départ de navigation Salvador – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil – 500 milles

Je quitte Salvador ce matin à 11 heures sous une pluie battante, désireuse de saluer, à sa façon, mon départ. J’y étais revenu mardi après avoir quitté, non sans regrets, le magnifique mouillage d’Itaparica où j’avais pris mes quartiers depuis presque un mois (carnet n° 6).

Le soleil qui a rapidement chassé la pluie, est à mes côtés lorsque je déborde le phare d’entrée de la baie de Bahia (rayé horizontalement de noir et de blanc) à l’extrême sud de la partie nord de celle-ci (vous me suivez ?).

La remontée vers le Nord est engagée… la journée se déroule gentiment avec un océan assez tranquille et un vent pas trop nerveux.

Vendredi 05 avril 2019 – Jour 1 de navigation Salvador – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

A l’identique de la veille, après une nuit plutôt calme, la journée se déroule dans de très bonnes conditions. J’ai parcouru 101 milles en 24 heures.

Pour le déjeuner, je déguste la langouste achetée au moment de mon départ d’hier. Ouverte en deux, huile d’olive, sel, poivre, ail… après une quinzaine de minutes de cuisson au four, elle est prête à être dégustée. Cuite à point. Je ne vous raconte pas…

Petite sieste, lecture, écriture… la journée passe vite

Samedi 06 avril 2019 – Jour 2 de navigation Salvador – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

L’océan est globalement calme. Les dix nœuds de vent ne me font pas faire des folies. Soa trace gentiment sa route. Je suis par contre obligé de tirer des bords compte tenu de l’orientation du vent, ce qui me fait faire beaucoup de chemin supplémentaire. J’ai cependant accéléré par rapport à hier, 108 milles au lieu de 101. Colossal !

Le soleil se couche vers 17h30. La remontée vers l’Équateur raccourcit les jours.

Tard en soirée, je suis sorti du lit par un accroissement subit de la gite de Soa. Le vent est monté d’un coup à près de 30 nœuds. Au près, génois et grand-voile entièrement déroulés, ça fait à l’évidence beaucoup. Je remplace le génois par la trinquette, ce qui calme à peine les choses. En complément, j’enroule une partie de la grand-voile. Soa se redresse légèrement. Je ne le sais pas encore, mais le ton du reste de la traversée est donné.

Pendant la nuit, je retrouve la voie lactée et ses millions d’étoiles. Celles sur lesquelles je me guidais lors de notre fin de parcours de transat sont désormais derrière moi. A l’inverse, la Grande-Ours qui était sur bâbord arrière, est maintenant sur tribord avant, le manche de la casserole tourné vers moi. Ouf, le Nord n’a pas changé de place.

Dimanche 07 avril 2019 – Jour 3 de navigation Salvador – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Troisième jour. La nuit a, une fois de plus, été tranquille. Je parviens désormais à tenir un cap qui me rapproche de la trace directe conduisant à Joao Pessoa et ce, à une vitesse assez constante de presque cinq nœuds. Cela me permet de parcourir 113 milles en 24 heures, je progresse.

Hier soir, j’ai doublé une plate-forme pétrolière, version ville flottante illuminée. Impressionnant. Sauf à être aveugle ou à dormir profondément, pas de risque de ne pas la voir alors que je suis passé à plus de cinq milles d’elle. Versailles à côté, fait pâle figure.

Dans une partie dégagée du ciel, plein ouest, j’ai vu le minuscule croissant de la lune nouvelle. Infini et magnifique renouvellement.

Ce matin à sept heures, l’odomètre de Soa indiquait 7000 milles.

Cet après-midi, après une pluie d’orage, chevauchée fantastique au bon plein. Grand-voile et génois un peu relâchés, j’ai navigué entre 7 et 8 nœuds avec des pointes à 9 et 10 nœuds durant 3 heures consécutives et ce, toujours en trace directe vers Jacaré. Oubliés les bords des jours précédents qui doublent les distances. Cela fait quelques temps que cela n’était pas arrivé.

Toujours soutenu en soirée, le vent m’a permis de conserver le même niveau de vitesse. Excellent.

Lundi 08 avril 2019 – Jour 4 de navigation Salvador – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Le vent est toujours là. J’ai navigué une partie de la journée entre 7 et 8 nœuds avec des pointes courantes jusqu’à 9,5 nœuds. Soa tient son record avec 155 milles en 24h. Pas confortable du fait de la gîte, mais plaisant et efficace. Du coup, Jacaré est en ligne de mire bien plus tôt que je ne l’imaginais il y a encore deux jours. Je vais même, sans doute, être obligé de ralentir.

Mardi 09 avril 2019 – Jour 5 de navigation depuis Salvador – Arrivée à Jacaré – Brésil

06h. Après une nuit volontairement immobile ou presque afin de ne pas dépasser l’embouchure du Paraíba, fleuve dans lequel se trouve la marina de Jacaré, je remets de la toile pour boucler la petite vingtaine de milles qu’il me reste à parcourir. Cerise sur le gâteau, après cinq jours de près bien gîtés où tenir debout est une préoccupation constante, je suis au portant et quasi à plat. Belle et tranquille navigation comme durant l’essentiel de la transat. Joao Pessoa, la ville la plus proche de la marina de Jacaré, est conforme au modèle américain adopté dans le pays, très hauts immeubles partout sur le littoral. Jacaré est, semble-t-il, à l’opposé de ça. Je m’en réjouis.

Contre toute attente (de ma part), après quatre jours et demi effectifs de navigation, je suis donc sur le point de toucher un deuxième lieu sur cette terre brésilienne qui m’accueille désormais depuis un mois et demi.

Je n’ai pas eu de réel problème de batterie (c’est à Jacaré que je les change) et n’ai donc barré que quelques toutes petites heures au total. Moyennant la coupure du frigo la nuit, je n’ai eu à faire que cinq heures de moteur sur l’ensemble de la traversée, l’hydrogénérateur donnant le meilleur de lui-même durant toutes les périodes où j’ai navigué à 5,5 nœuds et plus.

La seule vraie difficulté de ce type de navigation est celle du sommeil. Afin de pouvoir dormir l’esprit à peu près tranquille, j’avais fait le choix de m’éloigner significativement des côtes (25 à 30 milles / 55 km environ) afin de ne pas naviguer au milieu des bateaux de pêche qui, ici comme au Maroc, ne sont pas équipés d’AIS (détection entre bateaux pour les nouveaux lecteurs). Je n’ai donc rencontré que quelques rares cargos qui eux, sont obligatoirement équipés. Un seul est passé suffisamment près pour déclencher l’alarme qui est réglée sur 2 milles (3,7 km) ou 16 minutes. J’ai enchaîné des périodes de sommeil de vingt minutes d’abord puis, rapidement, de quarante minutes. Pas un must, surtout pour les dormeurs invétérés comme moi. Évidemment, la qualité de la récupération s’en ressent un peu, du moins les premiers jours. J’ai donc dormi également et selon le même rythme en journée… outre ma petite sieste traditionnelle après le café italien et les petits gâteaux secs, naturellement.

11h. Après trois heures d’un bord aussi confortable qu’agréable au portant, je quitte l’océan et embouque (c’est le terme !) le chenal balisé (bouées rouges à tribord, vertes à bâbord, à l’inverse de chez nous) qui conduit au Rio Paraíba et à la marina de Jacaré. Mon sentiment est un peu le même que celui ressenti au moment de l’arrivée de la transat… c’est bien l’océan.

JACARE / RIO PARAIBA – BRESIL – 7° 2. 029’ S – 34° 51. 371’ W

Côte basse, plages quasi en continu, chenal d’accès assez long, très bien balisé même si les numéros attendus des balises ne sont pas forcément présents. L’embouchure du rio Paraiba est relativement large. Par ses deux bras, le fleuve fait le tour de l’ile de Restinga. Un énorme silo à grains se trouve sur bâbord à l’entrée du fleuve. C’est la rive industrielle, quais pour gros navires, barge de transbordement d’une rive à l’autre pour les voitures et camions, tirée sur son côté par un remorqueur, quelques bateaux de pêche…

Un peu plus loin, en ligne, des maisons de pêcheurs puis, des bateaux, dont une bonne partie à l’abandon. La nature reprend ensuite ses droits. La végétation est verdoyante, la mangrove et ses palétuviers bien installée, les aigrettes, d’un blanc immaculé, semblent maîtresses des lieux.

Et enfin, la marina de Jacaré. Trois marineros sympas m’aident à amarrer Soa en bout de l’un des deux pontons. Une vingtaine de bateaux au total se trouvent là. Ils arborent des pavillons français, suisse, américain… J’ai croisé trois d’entre eux à Mindelo avant le début de la transat. A terre, une infrastructure sympa et bien pensée avec trois parties, construites en dur en forme de « U » et un grand espace central couvert. Des tables sommaires, des fauteuils au milieu. Les bureaux, cuisines, sanitaires, laverie (payante) et autres sont intégrés aux bâtiments. Une belle réalisation d’ensemble. Simple pour ne pas dire rustique mais efficace. Au-delà des personnels locaux, la marina est tenue par deux français et un belge. Les prix, exprimés en euros, ne sont pas aussi doux que ça. Globalement, côté rivière comme côté terre, l’ensemble est agréable.

Mercredi 10 avril 2019 – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Faute d’avoir pu y parvenir la veille, je réussi ce matin à faire commander les trois batteries AGM (la technologie utilisée) de 250 Ah (la capacité) sur lesquelles j’ai jeté mon dévolu (il fallait qu’elles rentrent dans le bac existant). Ouf ! La transaction n’a pas été sans surprise : 5% de frais de carte bleue sur le montant des batteries réglées à la marina (!), 45 € supplémentaires, non annoncés préalablement, pour le temps passé pour la recherche. Il n’y a pas de petits bénéfices. Malgré cela, livraison comprise, le prix global est presque inférieur de moitié à ce qu’il aurait été en France. A voir si la qualité sera au rendez-vous. Dix à quinze jours sont annoncés pour la livraison. Inch’Allah comme on dit à Mayotte.

Cet après-midi, j’ai fait mon premier (petit) tour à pied. A proximité, découverte de ce qui est censé être le village… une seule et unique rue habitée, bordée de maisons basses. C’est un peu comme si des murs parallèles avaient été construits d’un seul tenant tout au long de la rue et qu’ensuite ils avaient été cloisonnés pour aboutir à des maisons dont les façades ne doivent pas faire plus de cinq mètres pour la quasi-totalité d’entre-elles. Le tout est plutôt triste et respire une certaine pauvreté, pour ne pas dire une pauvreté certaine. Pas très engageant. Pour les français globalement bien nantis que nous sommes, indiscutablement, cela surprend. Nous ne nous rendons pas toujours compte du niveau de confort et d’hygiène qui sont les nôtres. Une petite fille qui jouait devant une maison m’a fait penser à Inaya (mon adorable petite-fille). L’une et l’autre, au propre comme au figuré, ne jouent pas dans la même « cour » et ne partent pas avec les mêmes chances dans la vie. Ainsi est le monde, ou plutôt, les mondes.

Jeudi 11 au mardi 16 avril 2019 – Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Je n’ai désormais plus qu’à attendre les batteries et à m’occuper d’ici leur arrivée. Je sors mon vélo de la soute et le monte. Je pars en repérage des alentours et du « grand » Carrefour local. Je parviens assez facilement à trouver la route du littoral qui conduit à Joao Pessoa, une dizaine de kilomètres plus loin. Des parties aménagées pour les deux roues permettent de rouler dans de bonnes conditions de sécurité.

N’ayant pas de raison particulière de rester au ponton, je me mets au mouillage dans la rivière, à mon retour.

Les soirées sont égaillées par un étonnant Boléro de Ravel dont les notes emplissent l’espace. C’est l’attraction, in vivo, de tous les soirs. Un saxophoniste circule en barque devant l’espace des spectateurs, à terre. Un peu plus tard, un violoniste prend le relai, à terre. Les bateaux de balade où l’on danse, chante, boit, ont déposé leurs lots de touristes. D’autres viennent par la route. Des boutiques de souvenirs sont présentes en grand nombre. Tout cet espace ne prend vie que vers 17 heures alors qu’il est fermé en journée. Surprenant et sympa.

Le samedi, je suis allé au village de Cabadelo, quinze ou dix-huit kilomètres plus loin, du côté de l’entrée du fleuve. La route d’accès n’est pas terrible du tout. Le marché est très bien achalandé, tous registres confondus, fruits, légumes, poissons, viandes, etc. J’ai très bien déjeuné sur place pour trois fois rien.

Mercredi 17 avril 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Je pars ce matin pour Olinda par la route. Le fis de Jean-Pierre, le belge de la marina, fait façon Uber (sans facture). Cent vingt kilomètres parcourus sur une route à 4 voies. La circulation est faible. Les maisons et constructions de bords de route me font penser au Maroc. Le tarif demandé est élevé…

La « pousada » que j’ai réservée, sorte de « bed and breakfast », est située au fond d’une impasse, en limite de ville historique. Le jardin arboré est très fleuri et parfaitement entretenu. Une piscine petit format apporte sa touche liquide. L’endroit est très calme. Sans fioriture, ma chambre est très correcte. La patronne est sympa.

Olinda est une ville ancienne construite à plat (aucun gratte-ciel). Les rues pavées sont bordées de jolies maisons basses ou à un étage. Les façades sont très colorées, du jaune, du vert, du bleu… Les églises pavanent à tous les coins de rue. Il n’y a pas grand monde.

A midi, je tombe par hasard sur un restaurant où les clients locaux se bousculent. Toujours bon signe. J’y déguste un excellent et très copieux plat de morue. Les cousins portugais ne sont pas loin. Un vrai régal.

A mon retour, je découvre le magasin qui fabrique et commercialise des Pasteis de Nata. J’en prends deux, histoire de goûter. Elles s’avèreront excellentes.

Jeudi 18 avril 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Le petit déjeuner maison est pantagruélique : jus de goyave frais, fruits préparés prêts à déguster, pain, gâteaux, et aussi œufs, saucisson, saucisses… Je ne sais pas si à trois nous aurions tout fini…

Le besoin se faisant sentir, je fais une halte chez Edson’art, coiffeur du coin. Edson (prénom du coiffeur) est sympa comme tout. Il m’a abondamment parlé… en portugais. Son salon est petit mais très bien agencé et décoré. Des disques vinyles et des photos couvrent une partie des murs. Le tarif est doux, 5 €. Nous nous sommes fait la bise.

Sur le parvis de l’une des églises principales de la ville, suite, je suppose, à une cérémonie religieuse, il m’est donné à voir une concentration de prêtres, moines, religieuses au mètre carré comme je n’en avais jamais vu de ma vie. Impressionnant. La religion et l’Église, semblent, ici, bien vivantes…

Sur les hauteurs d’Olinda, le point de vue sur l’océan, avec Recife en toile de fond, est superbe. Un écrin de verdure pour un bleu profond.

Le soir, compte tenu de la promesse d’un moment musical sympa, je reviens au même restaurant. La serveuse, celle-là même qui m’avait indiqué qu’il y aurait cette soirée musicale, m’accueille avec un grand sourire et me tend la main. Les trois musiciens ne semblent guère pressés d’entamer leur prestation. Leur répertoire s’avérera assez éloigné de mes goûts, dommage. Sur le chemin du retour, je passe devant deux bistrots dans lesquels un chanteur guitariste officie. Leurs répertoires m’auraient davantage plu…

Le soir, derrière les grilles, les portes et fenêtres des maisons sont ouvertes sur la rue. Certains intérieurs sont spacieux mais la plupart plutôt exigus. A l’intérieur, beaucoup de hamacs sont installés à demeure. Il s’en vend d’ailleurs beaucoup partout. Côté musique, c’est chacun pour soi. Les mélodies s’exfiltrent avec force des maisons. Elles se superposent et se télescopent. Tout le monde en profite.

A l’occasion de ma deuxième visite, la vendeuse de Pasteis de Nata, en me voyant arriver, se dirige promptement vers moi avec un grand sourire et me demande combien j’en veux ! J’en prends deux, cette fois-là encore.

Vendredi 19 avril 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Grande nouvelle du jour, Inaya (la « mienne », pas celle de Mayotte) vient de perdre sa première dent !!!

Au hasard de mon cheminement dans la ville, j’assiste à deux cérémonies religieuses. Pour le premier, un office avec uniquement des sœurs et de beaux chants collectifs à la clé. Des prières comme de longues plaintes. Dans la tradition. Le deuxième me surprend. Des fidèles qui, à tour de rôle après avoir été appelés, vont au pied de l’autel où de petits cierges, formant une croix, ont été installés au sol. A genoux, chacun souffle un des cierges pour l’éteindre… jusqu’à extinction complète. Je ne connaissais pas cette pratique et je ne sais quelle est sa signification…

Samedi 20 au mardi 30 avril 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Je rentre à Jacaré dans l’après-midi par le même moyen, onéreux mais confortable, de transport.

L’heure de la marée étant favorable, je quitte le ponton où j’avais mis Soa par sécurité durant mon absence, pour me remettre au mouillage.

Dimanche 21 au mardi jeudi 2 mai 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

L’attente forcée se poursuit. Je prends mon mal en patience en faisant beaucoup de vélo. Je goûte quotidiennement au plaisir du jus frais de coco, bu à la paille… en plastique (voir portraits).

Parmi les péripéties, mon moteur d’annexe fait de nouveau la tête. Impossible de le démarrer. Je reprends donc le chemin du ponton, le déplacement à la rame étant exclu compte tenu du fort courant. L’hypothèse de devoir également mouiller dans la rivière à Cayenne, faute de place au ponton, nécessite qu’il soit en état. Je fais donc contacter le mécanicien qui, en lien avec la marina, intervient habituellement.

Sur un tout autre registre, j’en profite pour faire laver un maximum de linge à la laverie de la marina : vêtements, draps, serviettes… Là encore, les tarifs ne sont pas doux. Lorsque je récupère mon linge, un de mes bermudas favoris manque à l’appel. La préposée m’assure qu’elle va chercher, demander auprès de ses autres clients… Je repartirai sans.

Vendredi 3 mai 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

Des quinze jours, maximum, initialement prévus, nous en sommes à 23. Jean-Pierre (celui qui a commandé les batteries pour 45 €) a déjà téléphoné au service de livraison… « c’est pour aujourd’hui ». Comme c’était déjà « pour aujourd’hui » lundi et mardi, la réponse ne me satisfait guère. Je fais le forcing pour qu’il rappelle et obtienne des informations précises quant au lieu où se trouvent les batteries (quitte à m’y rendre en taxi, cela irait peut-être plus vite que j’aille les chercher moi-même si elles ne sont pas trop loin). Poussé par ma forte insistance, il finit par obtenir le téléphone du chauffeur qui les a prises en charge. Après pas mal de tentatives, il parvient à joindre le chauffeur en question. Les batteries sont effectivement dans son camion, il assure qu’il les livrera, aujourd’hui…

Je passe l’après-midi à bord de Soa et m’active pour finaliser les préparatifs, pleins d’eau et autres, au cas où.

16h45. Il fera nuit d’ici trente ou quarante minutes. N’ayant pas de nouvelle, je me rends à la marina pour voir ce qu’il en est. Oh, miracle de miracle… les trois batteries sont devant la porte du bureau. Elles viennent, m’assure-t-on, d’arriver il y a quelques minutes. En voilà une très bonne nouvelle après trois semaines d’attente ! Prudent, je passe quand même immédiatement aux vérifications : voltage, ampérage, dimensions. Ce sont les bonnes, les dimensions sont celles du catalogue, tout va bien. Cerise sur le gâteau, la modalité de fixation des câbles de branchement, sur laquelle je n’avais pas d’information, est identique à celle de mes batteries actuelles. Les choses se présentent au mieux, le week-end est sauvé. Seul bémol, compte tenu de l’heure, les marineros débauchent (comme on dit chez moi). Le transport jusqu’au bateau attendra demain et l’installation aussi.

Samedi 4 mai 2019 Jacaré / Joao Pessoa – Brésil

08h00. Nous faisons le transfert des batteries. C’est l’un des jeunes marineros qui m’aide. Heureusement il est costaud. Chacune des trois batteries pèse 71 kg. Sans parler des quatre autres à évacuer, pas franchement légères non plus même si elles ne font « que » 50 kg.

09h00. Les batteries sont en place, callées dans leur bac, branchées. J’ai réussi à réaliser l’ensemble rapidement, batterie moteur couplée, en sus. Elles sont actuellement à 13 Volts. Excellente chose de faite.

Je consacre l’essentiel du reste de la journée à terminer l’avitaillement des produits frais (fruits, légumes, yaourts, poulet grillé…), à démonter et ranger mon vélo, préparer l’hydrogénérateur… payer la marina.

L’aspect financier me parait assez opaque. Euros et réals sont mélangés, le Brésil n’a pourtant pas encore fait le choix d’intégrer la zone euros. Le taux de change utilisé n’est pas précisé. Comme dit plus haut, en sus des services rendus payants, un supplément de 5% est appliqué pour tout paiement par carte bancaire. Les services de l’un des responsables français pour effectuer les papiers dans les trois administrations concernées (immigration, marine, douanes) sont facturés plein pot (60 €), transport en Renault Clio de 2005 compris. Si deux équipages sont emmenés en même temps, ce qui a été mon cas, c’est 60 € chacun soit 120 € pour environ quatre heures de temps et une quarantaine de kilomètres parcourus… soit un demi salaire minimum brésilien. Confortable. Le montant de la remise STW (association de navigateurs de plaisance dont la marina se réclame) n’est pas précisée. Ayant passé dix jours au ponton, le prix de journée spécifique « semaine » me sera appliqué sur l’ensemble (en plus ou à la place de la remise STW ?). Le prix ordinaire pour Soa est de 38 € pour des journées isolées. Près du double de la marina de Salvador, autant que les Sables d’Olonne (si ma mémoire ne me trahit pas), à peine moins que La Rochelle en saison (48 €). Le tout, sans facture aucune. Ces modalités financières laissent un goût bizarre même si tous sont accueillants, serviables et de bons conseils (escales sur la côte, magasins locaux, balades).

Pour mon bermuda, aucune compensation ne m’a été proposée. Pas le moindre mot d’excuse non plus au prétexte que la « dame » fait pourtant très attention.

Bien sûr, la marina est une entreprise, bien sûr la philanthropie n’est pas de mise, bien sûr c’est l’un des rares endroits au Brésil qui ressemble à une marina… Est-ce cette absence de choix qui fait qu’on a un peu l’impression de servir de pigeon.

Côté moteur d’annexe, j’ai failli m’étrangler quand la proposition de devis m’a été faite… l’équivalent de 150 € (20 € à Itaparica). Des pièces seraient à changer… N’ayant pas trop le choix, je donne mon accord. Le mécanicien en question changera un roulement et un joint que je verrai à respectivement 10 et 5 € à Cayenne. Pour ce prix, il aurait pu démonter et remonter entièrement le moteur plusieurs fois, sauf que… je m’apercevrai une fois à Saint-Laurent du Maroni, le moteur ne redémarrant pas, que le carburateur était encrassé et qu’il n’avait donc pas été nettoyé. Pigeon vole…

 

 

TRAVERSEE JACARE / BRESIL – CAYENNE / GUYANE FRANÇAISE – 1384 milles nautiques

Dimanche 5 mai 2019 – Jour 1 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

07h30 Après le petit déjeuner, j’attaque les derniers préparatifs : fil électrique me reliant au quai à rouler et ranger, hydrogénérateur à mettre en place, vaisselle… Les sanitaires de la marina étant à deux pas, j’en profite pour me doucher. Autant partir propre, n’est-ce pas ?!

08h00. Nous étions convenus avec la famille française (couple avec leur fille déjà croisés à Mindelo) du « Pourquoi pas » de partir de concert vers 10h, après appel VHF. Ce ne sera pas le cas, leur catamaran lève l’ancre et s’en va sans autre forme de procès. Paroles, paroles…

Durant les préparatifs, je m’appuie sur le fauteuil de barre… qui tourne sur lui-même. J’atterris sur le levier de commande moteur et plus particulièrement sur la boule située en haut du levier. Mes côtes accusent le coup (partie droite du dos). Douloureux sur le moment. Je poursuis néanmoins pensant à une douleur qui ne serait que momentanée.

9h15 Le marinero (très sympa) largue les amarres de Soa. D’un seul coup d’un seul, c’est parti pour les 1400 milles (2600 km) qui me séparent de Cayenne et de la Guyane française. Il me faut environ deux heures pour sortir du rio et attaquer l’océan. Plus de 20 nœuds de vent m’attendent ainsi qu’une mer très formée avec une houle de plus de deux mètres. Pour mon premier bord, j’ai fait le choix de rejoindre au plus court la ligne des mille mètres de fond avant de prendre mon cap au nord. Une vingtaine de milles m’en séparent. Cette hauteur d’eau donne une quasi assurance de ne trouver que des cargos, tous équipés en AIS (système de détection entre bateaux). Important pour dormir. Cette zone est souvent plus calme du point de vue de l’état de la mer et, par ailleurs, donne une marge importante de sécurité en cas de dérive ou de problème matériel par rapport à la côte. J’ai préparé toute ma route dans ces zones allant de mille à trois mille mètres, voire plus à certains endroits.

La journée passe vite à ne pas faire grand-chose. Je me ré-amarine…

Le soleil se couche actuellement vers 17h15. Il me gratifie d’un petit mais bien réel rayon vert. Fugace mais toujours magnifique.

La nuit est longue. Faisant cap désormais plein nord (0°/360°), la Grande-Ours me montre la voie.

Au vu de l’expérience de la transatlantique et de mes petits six cents milles solitaires précédents, après avoir attentivement écouté mes différents collègues navigateurs solitaires (dont Franck, ex-commandant de la marine marchande), je programme un réveil toutes les heures et demies. En réalité, je me réveille spontanément toutes les quarante-cinq minutes environ quand ce n’est pas l’alarme AIS qui me sort du sommeil (quatre ou cinq fois dans la nuit). A chaque réveil, tour attentif d’horizon, vérification de la route sur la centrale de navigation. Je renseigne le livre de bord une fois toutes les trois heures. J’ai entamé ma nuit à 18h30.

Douze heures de nuit noire, c’est long…

Lundi 6 mai 2019 – Jour 2 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

Le jour peine à se lever tant la couche nuageuse est dense et épaisse. La mer est toujours assez formée mais le vent a faibli. Le point quotidien que je ferai à 9h15, heure de mon départ de Jacaré, me permet de constater une avancée très satisfaisante de 130 milles parcourus, et ce, malgré une baisse de régime dans la deuxième partie de nuit. Remesurée à 11 heures, heure de « hissage » des voiles, ce sont 140 milles de faits. Cela augure bien.

Les batteries, dont c’était la première nuit de service en situation de navigation, se sont comportées comme elles devaient. Un vrai soulagement. Sur leur capacité de 750 Ah (quantité d’électricité stockée), seuls 5% ont été consommés dans la nuit par le pilote automatique, le réfrigérateur, la centrale de navigation et autres feux de route… Si j’avais dû barrer pendant les douze ou quinze nuits à venir, c’eut été autrement difficile !

  • 09h15 – 04°58 S / 34°53 W – Milles parcourus 24 h : 131 nm ; cumulés : 131 nm ; restants : 1253 nm

11h00. Position 04°49 S – 34°54 W. Milles parcourus 24 heures (après sortie fleuve) : 140 nm.

La journée se poursuit sur un très bon rythme. Un peu après 13 heures, j’empanne pour prendre mon nouveau cap Nord-Ouest (315°). Je suis désormais parallèle à la houle et quasi au vent de travers. Soa apprécie cette allure. Sous grand-voile seule, avec 20 nœuds de vent, nous naviguons entre 7 et 8 nœuds avec des pointes à 9 et parfois à 10, le tout en trace directe. Curieusement, dans la journée, ni cargo, ni autres bateaux d’ailleurs.

Une fois le soleil couché et la nuit installée, le croissant de nouvelle lune apparait, orangé. Il est à plat. Il se couche quelques temps après, plein Ouest, lui aussi. Je ne tarde pas à l’imiter…

Mardi 7 mai 2019 – Jour 3 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

Soa a filé toute la nuit. Le mouvement incessant que lui imprime la houle ne l’empêche pas d’avancer ni moi, de dormir.

04h15. Après un tour d’inspection, le renseignement du livre de bord fait, je me recouche. Quelques minutes plus tard, Soa s’incline sur le bord opposé à celui sur lequel nous naviguions. Dans des circonstances semblables, Gaby le marin aurait dit : « Je saute dans mon slip et je vais voir ». Pour ce qui me concerne, je suis allé voir fissa en oubliant le bout de tissu évoqué. L’anémomètre indique 35 nœuds de vent, la grand-voile est à contre (elle reçoit le vent du côté opposé de ce qui devrait être). Je reprends la main sur le pilote et m’aide du moteur pour remettre les choses dans le bon sens et Soa dans le droit chemin… non sans difficultés. Dans ce moment précis, je suis trop toilé, je reste donc à la barre. Ma nuit, bonne et réparatrice jusque-là, est momentanément interrompue.

05h30. Le jour se lève avec peine tant le ciel est bouché. Le baromètre du bord indique 1007 hp, rien d’alarmant dans la mesure où il est stable. Le vent s’est calmé mais je reste vigilant. Les 10 à 15 nœuds annoncés par la météo ne sont pas vraiment au rendez-vous, nous sommes 5 à 10 nœuds au-delà. Décision est prise de réduire la GV pour les nuits prochaines. Je vais perdre en vitesse mais gagner en confort et en tranquillité d’esprit.

Il pleut fréquemment et parfois abondamment. Dans ce type de circonstances, je me loue de la manière dont le cockpit de Soa est protégé. Naviguer au sec est inestimable (je pense à mes petits copains dont les barres sont à l’arrière de leur bateau, sans protection aucune) !

  • 09h15 – 03°52 S / 37°10 W – Milles parcourus 24 h : 162 nm ; cumulés : 293 nm ; restants : 1091 nm

Les fichiers Grib (prévision des vents) que je viens de télécharger prévoient une quasi absence de vent pour la nuit et la journée de demain… si cela se confirme, la moyenne va très sérieusement baisser.

Pour l’heure, je suis dans ma bulle nommée Soa. Confortable, avec vue largement ouverte sur l’extérieur, elle glisse lentement, le vent prenant un peu de repos après ces deux jours où il a donné de la voix. Dessous et sur les côtés, de l’eau salée dont le bleu habituel a laissé place à un gris des plus banals. Dessus, de l’eau douce, des tombereaux d’eau douce qui se déversent quasi en continu. Le ciel, totalement bouché, est uniformément gris. Gris sur gris donc. Pas le moindre minuscule coin de bleu, par la millionième partie d’un rayon de soleil. Une ambiance étonnante que quelques coups de tonnerre viennent agrémenter. La houle, dans l’axe arrière de Soa, va plus vite que nous. Dans un bruit sourd, il lui arrive de grimper allégrement la marche que constitue la jupe et de mouiller une partie du sol du cockpit.

17h00 – D’après les prévisions, le vent devait tourner à plus de 90°. C’est fait. Un empannage plus loin, au vent de travers sous GV et génois, nous reprenons le cap du Way Point n°3 au Nord-Ouest, 125 milles plus loin. Par douze nœuds de vent, notre vitesse est de sept nœuds, le courant de Guyane, aidant.

La nuit est tombée juste après la manœuvre. Je m’offre une tisane du « Sofitel » de Rabat. J’utilise la théière achetée, après moult tergiversation (la place, le poids, l’utilité), au souk de la même ville. La tisane est douce et parfumée. Un parfum complexe et subtil. Un plaisir.

Mercredi 8 mai 2019 – Jour 4 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

La nuit ayant été un peu occupée par les cargos et pétroliers, j’ai traîné au lit ce matin et ne me suis levé qu’à huit heures. Le mot lit est inhabituel sur un bateau où l’on parle généralement de couchette simple ou double. Mon lit est un vrai lit aux dimensions classiques du commerce (190x140cm) avec sommier à lattes et matelas en latex issu de chez une grande enseigne. Il est très confortable. Vous comprendrez aisément que je puisse avoir envie de m’y prélasser. D’autant que le devoir du navigateur rentier que je suis ne me presse guère.

  • 09h15 – 02°16 S / 39°04 W. Distance parcourue en 24 h : 152Distance cumulée : 446 milles.

En trois jours, au sens de trois fois vingt-quatre heures, Soa et moi avons donc parcouru le tiers de la distance nous menant à Cayenne. Belle chevauchée avec certaines heures à huit nœuds et de courtes pointes à plus de dix nœuds. Pour lui, comme pour moi, un record de vitesse.

11h00 – Le vent qui devait baisser depuis hier soir ne le fait que maintenant. Il est tombé à 5 nœuds… et ça devrait durer jusqu’à demain soir jeudi. Le ciel est beaucoup plus lumineux qu’hier, le bleu du ciel et le gris des nuages mènent bataille. L’océan a retrouvé son magnifique éclat bleu acier. L’eau est transparente… à donner envie de se baigner.

Même si je n’en vois pas énormément, les cargos et pétroliers évoqués plus haut sont foison. Il suffit pour s’en convaincre de consulter les sites tels que « Marine Traffic ». Il faut dire que 80% des marchandises transportées dans le monde le sont par la mer. Ceci explique cela. Un côté de la mondialisation que nous ne touchons que rarement du doigt, même si nous savons qu’il existe. Quelques exemples ci-dessous, tout à fait significatifs quant aux bateaux et à leurs pavillons, le plus souvent très complaisants (beaucoup de pétroliers du fait des champs pétroliers locaux, je pense) :

  • Cargo – FPMC B KINGDOM – 300x50x18 m – Pavillon : Libéria – Destination : Singapour – 8 nœuds
  • Pétrolier – CIC EPOS – 228x35x15 m – Pavillon : Philippines – Destination : inconnue – 10 nœuds
  • Pétrolier – HUEMEL – 161x23x10 m – Pavillon : Panama – Destination : inconnue – 9 nœuds
  • Pétrolier – NEW PROSPERTY – 330x60x11 m – Pavillon : Hong Kong – Destination : inconnue – 9 nœuds
  • Pétrolier – STEALTH FALCON – 180x32x12 m – Pavillon : Libéria – Destination : inconnue – 15 nœuds
  • Cargo – GOVIS SIRIUS – 199x35x9 m – Pavillon : Iles Marshall – Destination : inconnue – 17 nœuds

A quoi occupe-t-on son temps en navigation solitaire ? A l’exception de celles qu’on entretient avec soi-même, évidemment, pas de discussions avec les autres. Alors ? Dormir tient incontestablement la corde. C’est essentiel pour rester en forme et disposer de ses pleines capacités intellectuelles et physiques. Vient ensuite la conduite et la sécurité du bateau : dérouler, rouler, régler les voiles, virer ou empanner (changer de côté du vent par l’avant ou l’arrière du bateau), faire et suivre la route en fonction des courbes de fonds, du vent et de la météo, connaître sa position, vérifier son cap, surveiller les alentours visuellement et depuis la centrale de navigation, renseigner le journal de bord. Pour le reste, un peu de bricolage, de nettoyage, faire la cuisine, manger… Et puis aussi, écrire ce fil de l’eau, activité sympathique mais chronophage (j’aimerais que cette 7ème itération, celle de ma fin de parcours brésilien et de mes navigations solitaires, soit bouclée ou presque à mon arrivée à Cayenne). Pour finir, autre activité et pas des moindres, contempler ! Et il y a de quoi, de jour comme de nuit.

A ce sujet, sur tribord, au niveau de l’horizon, une ligne continue d’énormes nuages déversent en quatre points bien distincts ce qui doit être des trombes d’eau… Étonnant spectacle de la nature. Le temps que j’observe depuis hier ressemble fort aux caractéristiques habituelles de la zone intertropicale de convergence dite « pot au noir ». Et il faudra bien la franchir.

12h00 – 02°07 S / 39°16 W – Je viens de passer au 315° afin d’entamer mon avant-dernier tronçon de navigation, de très loin le plus long puisqu’il fait 830 milles (1530 km). Il me fera repasser dans l’hémisphère Nord et me conduira à la perpendiculaire de Cayenne, à 90 milles de la côte (05°28 N / 50°43 W). Ce choix tient au fait que cette zone est très peu profonde et que je préfère donc la traverser au plus court même si c’est relatif. A titre d’image, ce grand « bord » équivaudrait à rallier d’une traite le Sud du Portugal depuis La Rochelle. Au milieu de ce parcours et au plus loin, je serai à quelques 200 milles des côtes (370 km). Actuellement, je n’en suis « qu’à » 60 milles (110 km). A cette distance, le halo lumineux des villes est encore bien visible. Ce ne sera plus le cas ensuite.

17h45 – Spectacle du soir. On ne sait ni de qui sont les décors, ni de qui est la mise en scène. Le soleil décline. L’Ouest est tapissé de nuages. Celui derrière lequel le soleil se cache est énorme avec une vraie forme d’enclume, un socle, une partie large et plate au-dessus (on en parle souvent en météo mais on n’en voit pas si souvent que ça). Dans cette masse nuageuse, trois fenêtres sont percées côte à côte. Les rayons du soleil s’y engouffrent avec une vivacité étonnante. Ils irradient. Puis, plus rougeoyant, l’astre passe sous la partie droite de l’enclume. Son orangé est vif, très vif. L’ensemble est magnifique. A la verticale, très haut dans le ciel, le tout petit premier quartier de lune apporte la touche sensible finale… comme un brin de féminité. Magique.

Jeudi 9 mai 2019 – Jour 5 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

La nuit a été très calme. Toujours agréable… et reposant. Les batteries qui avaient peu chargé hier du fait d’une vitesse assez basse et d’une quasi absence de soleil, affichaient ce matin : 12,20 Volts, 174 Ah consommés soit 14% des 750 Ah du parc servitude. Elles ont rempli leur mission sans broncher. Je suis pleinement rassuré de ce côté.

  • 09h15 – 01°10 S / 40°39 W – Milles parcourus 24 h : 116nm ; cumulés : 562 nm ; restants : 822 nm.

Cent seize milles, notre plus faible distance journalière parcourue.

Péripéties toujours (au pluriel, c’est plus sympa)… Les messages reçus par l’Iridium sont, pour une raison que j’ignore, incomplets. Un mot clé de fin est nécessaire pour savoir s’ils sont ou non complets. La pompe à eau de mer a désamorcé à un moment de gite un peu prononcé. La réamorcer n’est pas compliqué même si plusieurs manipulations sont à exécuter de manière ordonnée : fermer la vanne d’arrivée, remplir le filtre qui s’est partiellement vidé, ouvrir la molette qui permet de faire évacuer l’air emmagasiné, ouvrir le robinet correspondant, remettre la pompe en route en ré-ouvrant immédiatement la vanne d’arrivée. Problème, la molette d’évacuation d’air me reste dans les mains. La pompe re-fonctionne mais un peu d’eau coule à chaque utilisation. J’essaie la pâte à voie d’eau. Sans succès. La pression doit être trop forte. J’ai une sorte de produit qui, une fois sec, durcit. Il suffit de le malaxer, de l’appliquer, de le laisser durcir. Banco ! Il vaut mieux être équipé.

Il pleut encore… je m’empresse de fermer les capots ouverts

16h15 – Petite, mais bien réelle frayeur, le baromètre vient de chuter d’un coup de 12 hP passant de 1007 hP à 995 hP en quelques minutes. Simultanément le vent est monté à 30 nœuds et des trombes d’eau s’abattent sur l’océan. La houle de trois mètres, à la crête blanchie, malmène passablement Soa (et moi par la même occasion). Je me mets au poste de barre pour le cas où je devrais intervenir rapidement. Mon père disait souvent : « C’est dans le grain qu’on voit le marin ». Tout petit grain ici, bien sûr, mais néanmoins.

Craignant une évolution problématique des données météo, je demande à Valérie qui suit ma route depuis Bordeaux, si quelque chose d’imprévu jusque-là est annoncé. Ce n’est pas le cas. Tant mieux. Il n’y a donc qu’à attendre que ça passe.

17h00 – Et ça passe. Le vent est retombé à 20/25 nœuds, la pluie a cessé, il fait encore jour. Afin de me garantir une nuit plus sûre voire plus confortable, j’en profite pour prendre deux ris dans la grand-voile. Tout particulièrement dans ce genre de moment, seul qui plus est, j’applaudis à l’option GV sur enrouleur ! Pour mémoire, quasi vent arrière, avec cette intensité de vent, je ne navigue qu’avec la seule GV.

Réflexion. Naviguer en solitaire est grisant voire euphorisant. Dans cette configuration, on ne peut bien sûr compter que sur soi. Si le bateau se doit d’être préparé au mieux, disposer des aides nécessaires à la navigation, il me semble qu’il vaut mieux, en complément, développer une confiance en soi et une relation à soi-même de plutôt bonnes qualités. Si l’on est d’un naturel inquiet ou angoissé, je crois qu’il vaut mieux éviter de se confronter à ce type de situation.

Vendredi 10 mai 2019 – Jour 6 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

04h00 – La nuit est globalement calme. Le vent a sérieusement baissé. Après quelques hésitations, je déplie entièrement la GV ce qui permet de gagner un bon nœud. Toujours ça de pris.

06h00 – « Noir c’est noir » et « Il pleut bergère ». Bien que ce ne soit pas tout à fait le même registre, la combinaison des deux est de rigueur. Le ciel est tellement foncé qu’il est quasi noir et, histoire de changer un peu, il pleut abondamment. Pas d’endroit par contre pour rentrer les blancs bateaux. Le terme « pot au noir » colle parfaitement à la situation. L’océan, gris de gris lui aussi, est très haché. Rétrospectivement et même si j’en avais déjà une pleine conscience, cela confirme la qualité des conditions que mes équipiers et moi avons rencontrée durant la transatlantique, zone intertropicale anecdotique comprise.

08h15 – 00°00’ N/S – 42°25 W – Quatre jours et 23 heures après mon départ, pour la deuxième fois au cours de cette année 2019, l’Équateur s’offre à nous (Soa et moi). Avec lui, simultanément, et c’est le hasard des choses, débute la deuxième moitié de la route menant à Cayenne, 692 milles faits, 692 restants à faire.

  • 09h15 – 03°52 S – 37°10 W. Distance parcourue 24 heures : 133 milles. Distance cumulée : 696 milles.

Soit une moyenne sur ces cinq premiers jours de 140 milles parcourus quotidiennement. Très au-delà de notre moyenne de transatlantique, callée à 100 milles par jour.

En début d’après-midi, un gros oiseau trapu, marron foncé, est venu me rendre visite. Il s’est fendu de grands cercles au-dessus de Soa puis s’est posé un moment sur l’océan avant de reprendre sa route. Comme dit Hemingway par la bouche de Santiago, héros du « Vieil homme et la mer » que je viens de relire : « Nul n’est jamais complétement seul en mer ». Ce vieux mais opiniâtre pêcheur cubain, n’a plus rien pêché depuis quatre-vingt-cinq jours. Convaincu cependant que l’espoir demeure et qu’il ne faut jamais renoncer, il continue à pêcher. Ce jour-là, seul à bord, un énorme espadon mord à son hameçon. Au terme de trois jours de lutte épique, il parviendra à le ramener à côté de sa barque et, malgré le respect qu’il a pour lui, à le tuer. Las, sur la route du retour vers La Havane, les requins finiront par dévorer entièrement l’espadon. Mais, du fait de sa ténacité et de son courage, son honneur de pêcheur est sauf. Ce qui importe, même si la victoire s’est muée en défaite, c’est l’effort pour braver le destin (thèmes chers à Hemingway).

Cette fiction me semble porter une vision de l’Homme que l’on retrouve dans les récits d’aventures bien réelles celles-là, de Bombard (Naufragé volontaire) et Tavae le pêcheur polynésien à la dérive (Si loin du monde) que j’ai déjà eu l’occasion d’évoquer dans mes fils précédents.

Cette lecture me fait prendre conscience que, comme Santiago, je me parle à moi-même (pas encore à d’autres, imaginaires, ouf). Le fait d’être seul, d’être dans une forme d’action ? Bien sûr. Ceci dit, à l’époque où je jouais au tennis, j’ai entendu nombre de joueurs, et moi avec eux, se parler, s’encourager, s’engueu… Ça me rassure, pas encore la sénilité.

Un peu plus tard, j’attaque ma confiture d’ananas. J’en avais acheté quatre qui commençaient à bien mûrir. Je ne réussis qu’à faire trois pots et demi avec. Bien peu. Ils ont fait beaucoup de jus dont je n’ai utilisé qu’une partie. A voir ce que ça va donner.

Après une journée sous le signe intégral du gris (la deuxième et demie) et du manque de luminosité, juste avant le coucher du soleil, comme un ersatz de lumière. Entendons-nous, il ne s’agit pas là de ciel bleu mais juste de quelque chose de plus clair avec une touche d’oranger, juste dans l’axe du bateau. Un vrai plaisir. Peut-être cela augure-t-il d’une amélioration à venir ?!

La nuit tombe significativement plus tard au fur et à mesure de mon déplacement vers le Nord. Une bonne heure de plus déjà, ce qui est important. Cet allongement de la durée du jour va se poursuivre et j’en suis ravi. Les nuits sont d’autant plus courtes.

Pour clore cette journée exceptionnelle (franchissements de l’Équateur, mi-parcours), sans compter peut-être la fin prochaine du pot au noir, je décide de m’octroyer un T’Punch au Damoiseau vieux et donc ambré (quantité très raisonnable et à coup sûr insuffisante pour « marcher sur ses deux jambes » comme disent les domiens). Olives aux anchois, noix de cajou, un zeste de Paolo Conté pour compléter… La vie vaut d’être vécue.

18h30 – La nuit noire a succédé à la demi nuit grise. Peu avant, désormais plein vent arrière, j’ai roulé le génois que je portais très utilement depuis ce matin. Cinq nœuds quand même avec dix nœuds de vent. La lune, bien que derrière les nuages, est bien visible. Elle aussi est dans l’axe de notre déplacement. Elle grossit un peu plus chaque jour. Toujours agréable, la nuit, de bénéficier de sa lumière.

Samedi 11 mai 2019 – Jour 7 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

La nuit a été active. Minuit, le vent arrivant par le travers, je déroule le génois, ce qui augmente très sensiblement la vitesse. Une heure plus tard, le vent est complétement tombé. Je roule le génois et mets le moteur, ce qui ne fera pas de mal aux batteries, la charge de la journée d’hier ayant été faible faute de soleil et de lumière. Trois heures, le vent est de retour, je déroule une nouvelle fois le génois… Ainsi va parfois la vie nocturne du marin à voile. Pas toujours de tout repos.

06h00 – L’œil que j’entrouvre est frappé par le soleil (disparu depuis deux jours et demi). Fantastique. De fait, même si la grisaille domine encore, quelques parcelles de bleu sont visibles. Ça fait du bien. La ZITC n’a cependant pas encore abandonné la partie…

Je goûte ma nouvelle confiture d’ananas. À mi-chemin de la confiture et du fruit confit. Trop liquide, elle est un peu curieuse, mais très goûteuse. La taille des morceaux de fruit, que j’ai fait plus gros que d’habitude, me convient bien. Pas assez cuite ou trop de jus utilisé !? Si des spécialistes ont la réponse, je les remercie de me conseiller (Marcelle ???)…

  • 09h15 – 01°11 N – 44°14 W – Milles parcourus 24 h : 127nm ; cumulés : 823 nm ; restants : 561 nm

J’ai cuisiné poivrons et tomates pour mon déjeuner. Avec des oignons blancs, du poivre, du sel de l’Himalaya, une explosion de couleurs et de goûts. Un régal pour l’œil et le palais.

Après avoir navigué avec toute la toile ce matin, j’ai remisé le génois et sorti la trinquette. Un peu moins rapide certes (5 nœuds) mais nettement plus confortable.

Après Paolo Conté, Brassens, Nougaro…

Dimanche 12 mai 2019 – Jour 8 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

Cette fois encore, la nuit fut active et peu reposante. En forme hier soir, je ne me suis endormi que vers minuit. Les 12/13 nœuds de vent annoncés par les Grib m’ont fait faire le choix de laisser GV et génois entièrement déroulés. Je savais bien sûr que je prenais le risque de devoir intervenir. Pas loupé ! A deux heures, le vent est à 20/25 nœuds. Je réduis drastiquement le génois ce qui ne nous ralentit qu’à peine (autour de 7 nœuds).

A cette même heure, le troisième tiers du parcours s’engage. La lumière de la lune qui est désormais demi pleine, est à peine visible.

Cinq heures, le vent s’est établi entre 25 et 30 nœuds. Je roule complétement le génois et prends deux ris dans la GV. Soa cogne moins. Malgré cette nouvelle réduction (il reste la trinquette et un tout petit bout de GV), en trois heures de route, nous parcourons vingt milles.

La houle nous arrive plein travers, parfois violemment. Elle heurte Soa dans un bruit sourd. J’aurais un bateau en contre-plaqué, comme il en existe, je me demanderais à chaque choc quand ça va poser problème. La construction de Soa est très rassurante (aluminium).

La ZICT fait de la résistance. J’espérais voir un bout de ciel bleu ce matin, après plus de trois jours de grisaille, que nenni. Nuages empilés, juxtaposés, collés, en bande, à la queue-leu-leu, blanc intégral, gris clair, gris foncé, noirs, ils sont tous là. Ils ont pleinement et entièrement repris possession du ciel. Pour être au diapason, l’océan a pris la même teinte réjouissante. Un bonheur.

  • 09h15 – 02°29 N – 46°10 W – Milles parcourus 24 h : 143nm ; cumulés : 966 nm ; restants : 418 nm

Ce matin, cela fait donc sept jours au sens de sept fois vingt-quatre heures que j’ai largué les amarres et quitté Jacaré. Pas tout à fait mille milles mais presque. Une belle balade déjà à un rythme plutôt soutenu. Si les conditions se maintiennent, l’hypothèse d’une arrivée mercredi est de plus en plus plausible. Si le vent baisse, ce sera jeudi. A voir aussi avec la marée, le port de Dégrad des Cannes (Cayenne) étant dans le fleuve Mahury, je devrai tenir compte du courant et des hauteurs d’eau pour le rejoindre.

Sept jours de navigation, sept jours de solitude aussi (si l’on excepte mes rares contacts satellitaires journaliers). Mes seuls compagnons sont Soa, l’océan et le vent… et un oiseau de temps en temps. Pas vu le moindre dauphin depuis le départ. Aucun cargo ou pétrolier depuis trois jours non plus.

Cette pensée de la solitude me renvoie sans coup férir aux multiples rencontres, belles et attachantes parce que gratuites et inattendues, faites au cours de ces bientôt dix mois de voyage, de ces cinq pays visités et des sept mille milles parcourus. La galerie de portraits que j’ai entamée lors de mon carnet n° 6 ne l’a été que trop tardivement. Je vais progressivement tenter de corriger le tir, rattraper le temps perdu et honorer celles et ceux que j’ai rencontrés préalablement, soit comme équipiers, soit au hasard de mes escales. A cette occasion, je repensais, j’y repense souvent d’ailleurs, à Yanis, fils de Khadija qui m’a tout particulièrement marqué. Comment un gamin de onze ans peut vous transporter de plaisir, de gentillesse et d’intelligence ?! Hors « ma balade dans le monde » et ses diverses péripéties, jamais nos chemins ne se seraient croisés. Une richesse vivante et vibrante, ces rencontres, ce gamin.

15h30 – Cette fois ça y est, la barre des 1000 milles (1852 km) est franchie. Une trotte quand même, surtout quand on pense à la vitesse de déplacement d’un bateau. Il me reste à parcourir 384 milles environ (700 km). Le rapport est largement en ma faveur.

Mes côtes, que j’avais un peu froissées contre le levier de commande moteur le jour du départ, me font toujours mal… significativement, même. A coup sûr, pas aussi anodin que je le croyais.

Lundi 13 mai 2019 – Jour 2 – Jour 9 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

La nuit a été beaucoup plus calme malgré le brusque changement de direction de vent qui s’est produit à 22 heures. Il est passé du Nord-Est au Sud-Ouest d’un coup. Empannage, GV du mauvais côté… que j’ai déplacée sur tribord. Minuit, même chose en sens inverse. Un peu plus tard, vent au repos, moteur durant une heure trente (pendant laquelle mon sommeil fut profond). Fin du moteur, 9 à 10 nœuds de vent revenu, je remets le génois (j’avais laissé la GV) et c’est reparti à la voile autour de 5/6 nœuds… de mon côté, j’ai replongé dans les seuls bras qui sont à bord !

08h00 – Même si des nuages subsistent, le soleil domine très largement. Qu’est-ce que ça fait du bien, du soleil, du ciel bleu et l’océan idem ! Pour la première fois depuis quatre jours, je relève les bâches latérales du cockpit et ouvre tous les capots à l’abri des entrées d’eau. Cela me rappelle l’essentiel de nos journées de transatlantique. Un vrai grand plaisir que celui de naviguer dans ces conditions. Quand je pense que certains ont essayé de me vendre le grand Sud avec son climat hivernal en belle période et donc son froid, ses pluies quotidiennes et l’humidité qui va avec et imprègne tout… Il n’y a pas de doute, je préfère souffrir du chaud que du froid et de la pluie.

  • 09h15 – 03°35 N – 47°49 W – Milles parcourus 24 h : 123nm ; cumulés : 1089 nm ; restants : 295 nm

Le rythme de la nuit nous a un peu ralenti.

Pilote automatique. Permettez-moi, ici, de lui rendre un hommage appuyé. Sacrée belle et utile invention ! Certes, il n’anticipe pas puisqu’il réagit à posteriori en fonction des données qu’il collecte et analyse par rapport à la route qu’on lui a demandé de suivre (ou à l’angle du vent par rapport au bateau) mais quelle régularité et réactivité ! Sa gestion des correctifs apportés est une leçon. Aucune inattention d’aucune sorte. Les mouvements qu’il transmet à la barre ont une très faible amplitude, comparés à ceux, le plus souvent, que nous lui infligeons lorsqu’il nous vient l’idée (saugrenue ?) de prendre sa place.

12h00 – 15 à 20 nœuds de vent, autour de 7 nœuds de vitesse, mer belle, grand soleil… ça, c’est de la navigation plaisante. Ça redonne la pêche. Du coup, j’ai rangé, nettoyé… je me suis même coupé les ongles de pieds… qui commençaient à en avoir grandement besoin. C’est dire.

Anecdote. Pour déjeuner, après l’avocat en entrée (la moitié du dernier), je décide de casser deux œufs sur le reste de poivrons-tomates-carottes qu’il me reste. Par précaution, je prends soins de procéder à la classique expérience de flottaison afin de vérifier qu’ils sont bons. Expérience réussie. Je casse donc le premier dans la poêle. L’inconsistance de l’œuf me donne de sérieux doutes. Je jette. Même chose pour le deuxième et le troisième. Le quatrième me réserve une surprise… c’est carrément un poussin qui s’y développe ! Je n’avais encore jamais vu ça. Ce sont des œufs que j’avais achetés une quinzaine de jours plus tôt. Heureusement j’en ai une autre boite.

15h00 – C’était trop beau pour que ça dure, l’après-midi est envahi par les nuages, bien épais et bien gris.

En milieu d’après-midi, j’ai pu observer ce que mes amis pêcheurs de Mayotte appelaient « une chasse », c’est-à-dire, un important rassemblement d’oiseaux. Ils sont indicateurs de la présence de poisons. C’est la première chasse de cette ampleur que je vois depuis mon départ de La Rochelle et ce, très loin de la côte. Lorsque des gros poissons coursent les plus petits, ces derniers remontent en surface, poissons volants compris… et c’est à ce moment-là que les oiseaux entrent en scène et se mettent à table.

Le vent est monté en fin de soirée, jusqu’à plus de trente nœuds. Soa tutoie les 8 nœuds de moyenne mais gîte beaucoup. Désireux de dormir avant l’arrivée, je fais le choix d’enrouler entièrement le génois, ce qui redresse le bateau et limite considérablement d’éventuelles embardées problématiques… le tout, moyennant un nœud et demi ou deux de moins. Pas grave, comme dirait ma petite fille.

Mardi 14 mai 2019 – Jour 10 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

De fait, la nuit fut bonne et reposante. La lune bien visible à certains moments. Elle s’est couchée un peu avant le petit matin. Soa a continué à tracer sa route. En plus des activités habituelles, trois choses impératives m’attendent ce matin.  Parmi les hypothèses que j’ai envisagées, 1/ décider de la route d’atterrissage ; 2/ vérifier l’heure de marée pour savoir à quelle heure je dois embouquer le fleuve Mahury (je dois entamer ma remontée du fleuve deux heures avant la pleine mer pour naviguer avec le flot, plus calme sur ces deux dernières heures que sur les deux précédentes – règle des douzièmes de marée) ; 3/ en complément de l’AIS, régler l’alarme du radar pour la zone d’arrivée (mouillage d’attente) sachant qu’elle risque de se faire durant la nuit. Six heures trente, je suis à jour.

Notre nouvelle route au 290° (au lieu de 320°) nous permet de rester tribord amure et de continuer à naviguer en trace directe, ce qui est toujours le mieux, la ligne droite étant, parait-il, le plus court chemin entre deux points. La marée haute de mercredi est prévue pour 15h41 avec 2,90 m d’eau au-dessus du zéro des cartes (le zéro des cartes est la hauteur d’eau qui reste à marée basse de vives eaux c’est-à-dire les plus gros coefficients de 120). Sachant que j’ai dix milles à faire dans le Mahury, je dois donc entamer ma remontée aux alentours de 13h45. Côté radar, j’ai réglé une couronne d’alarme à deux milles. Ça devrait sonner pas mal.

  • 09h15 – 04°49 N – 49°58 W – Milles parcourus 24 h : 152nm ; cumulés : 1241 nm ; restants : 143 nm

A l’occasion de cette dixième partie diurne de journée, la Guyane est en ligne de mire après, réellement, 9 x 24 heures de navigation (c’était la classique question du « certif » sur les intervalles). Si les conditions se maintiennent, je devrais arriver en zone d’attente de Cayenne avant les 240 heures / 10 journées pleines de navigation (mercredi 09h15). C’est là que j’attendrai la marée montante de l’après-midi.

16h00 – Pour l’heure, le temps est toujours gris mais plutôt calme, la mer assez belle, 12 à 15 nœuds de vent. Nous avançons gentiment autour de 6/7 nœuds.

Ce soir plus que jamais, mais j’ai fait de même presque chaque soir, je m’installe dans le cockpit environ une heure avant le coucher du soleil. Installé à l’abri sur la banquette sous le vent ou sur le fauteuil de barre, je contemple l’océan et ses mouvements, la houle qui poursuit et rattrape Soa, le ciel et ses couleurs, les nuages, les voiles… pas de méditation au sens technique du terme mais sûrement un effet assez semblable, apaisant et agréable, en tous cas. Une sorte de communion avec la nature.

Mercredi 15 mai 2019 – Jour 11 – Navigation Jacaré / Brésil à Cayenne / Guyane française – 1384 milles

05h00 – Cayenne refuse de se livrer immédiatement…il parait qu’il en est ainsi des amours vrais ?! L’heure de marée ne me permettant pas de rejoindre le port de plaisance de Dégrad des Cannes maintenant, je jette l’ancre dans la zone d’attente des navires de commerce. Un repos, version sommeil bien mérité, s’offre à moi. Il est le bienvenu.

Las, la houle fait rouler Soa au point que je ne parviens pas à m’endormir… ce qui est plutôt très rare.

13h00 – J’entame la remontée du Mahury en tout début de marée. Un cargo de la CMA CGM se présente quasi en même temps que moi. Par pure politesse, je l’ai laissé passer (sourire). Le chenal est très bien balisé. Il passe entre les deux ilets verdoyants nommés « Le père » et « La mère ». Original, non ? Le deuxième abrite une colonie de singes, me sera-t-il dit un peu plus tard.

16h15 – Port de Degrad des Cannes / Fleuve Mahury – 4° 51. 136’ N – 52° 16. 940’ W

Cayenne. Soa est de nouveau amarré à un ponton.

A la suite du chapitre brésilien s’ouvre celui de la Guyane française, inconnue de moi.

Bonjour à elle.

 

RECAPITULATIF TRAVERSEE JACARE / BRESIL – CAYENNE / GUYANE FRANÇAISE

Ces données sont celles de chaque 24 heures à 09h15 locales.

Distance totale estimée à parcourir : 1384 nm (milles nautiques en anglais)

  1. Dimanche 05 mai 2019 – Départ Jacaré 9h15
  2. Lundi 06 : 04°58 S / 34°53 W – Milles parcourus 24 h : 131 nm ; cumulés : 131 nm ; restants : 1253 nm
  3. Mardi 07 : 03°52 S / 37°10 W – Milles parcourus 24 h : 162 nm ; cumulés : 293 nm ; restants : 1091 nm
  4. Mercredi 08 : 02°16 S / 39°04 W – Milles parcourus 24 h : 152 nm ; cumulés : 446 nm ; restants : 938 nm
  5. Jeudi 09 : 01°10 S / 40°39 W – Milles parcourus 24 h : 116 nm ; cumulés : 562 nm ; restants : 822 nm
  6. Vendredi 10 : 00°03 S / 42°39 W – Milles parcourus 24 h : 133 nm ; cumulés : 696 nm ; restants : 687 nm
  7. Samedi 11 : 01°11 S – 44°14 W – Milles parcourus 24 h : 127 nm ; cumulés : 823 nm ; restants : 561 nm
  8. Dimanche 12 : 02°29 N – 46°10 W – Milles parcourus 24 h : 143 nm ; cumulés : 966 nm ; restants : 418nm
  9. Lundi 13 : 03°35 N – 47°49 W – Milles parcourus 24 h : 123 nm ; cumulés : 1089 nm ; restants : 295 nm
  10. Mardi 14 : 04°49 N – 49°58 W – Milles parcourus 24 h : 152 nm ; cumulés : 1241 nm ; restants : 143 nm
  11. Mercredi 15 – 16h15 : 04°51 S / 52°17 W – Degrad des Cannes – Milles cumulés : 1392 nm

 

NAVIGATION SOLITAIRE

Alors, que penser de ces premières balades en solitaire et de ces presque 2000 milles parcourus (par comparaison aux 2100 milles de la transat) ?

Être seul, n’est pas un problème. Seul ou à plusieurs, le temps passe à une vitesse folle. Pas le temps de s’ennuyer. Bien au contraire, pas le temps de tout faire. Un comble, me direz-vous !

Conduire seul le bateau se fait facilement par temps raisonnable. La barre est idéalement protégée et toutes les actions sur les voiles peuvent être réalisées depuis le cockpit. Quelques moments un peu chauds lorsque de brusques surventes, dues aux orages et aux énormes nuages qui parsèment le ciel, déboulent, faisant passer l’anémomètre de 15 à 35 nœuds en quelques secondes. Au milieu de la journée, ça va, la nuit, en plein milieu d’un moment de sommeil… c’est moins facile. Mais ça se gère.

Des précautions supplémentaires sont par contre à prendre en termes de sécurité, et, tout particulièrement, afin de ne pas tomber à l’eau. Personne dans ce cas là pour lancer la bouée et faire faire demi-tour au bateau… et 25 milles à la nage, ça fait très, très, très long, surtout avec les requins. Prévenir donc. En dehors du cockpit lui-même, je porte systématiquement mon harnais à gonflage automatique et la longe trois points qui lui est dédiée. Lorsque je me déplace à l’avant du bateau, avant de quitter le cockpit, je frappe la longe sur la ligne de vie qui court de l’arrière du bateau jusqu’à la pointe avant. Je suis donc en permanence « attaché » à Soa. Je fais de même lorsque je winche à cheval sur les hiloires (parties situées entre le cockpit et le passe-avant sur lesquelles sont fixés les winches) même si les mains courantes, hautes et rigides, qui entourent toute la partie arrière de Soa, constituent une vraie sécurité (habituellement, ce sont des filières souvent assez basses, que l’on trouve sur les bateaux, à l’exception notable des Amel sur qui j’ai pris modèle). En complément du harnais, je porte ma balise individuelle AIS et ma télécommande de pilote (à priori je dois pouvoir stopper Soa avec en le faisant mettre à la cap).

Au-delà de l’aspect sécurité, il est indispensable de tout anticiper et de préparer en amont, le bateau, la voilure pour la nuit, la route, les amarres pour le port ou la bouée à prendre…

D’un point de vue personnel, on ne peut – évidemment – compter que sur soi. Ce qui change sérieusement la donne. Mieux vaut être au point quant à la conduite du bateau, sur les réponses à avoir en fonction de la météo… Il parait également indispensable d’entretenir une relation à soi-même de plutôt bonne qualité, de développer une certaine confiance en soi (peur ou anxiété ne font pas bon ménage avec ce type d’activité).

Au final, une expérience valorisante et « jouissive » en même temps qu’une expérience acquise, ce qui améliore encore la confiance. Penser qu’on peut le faire est une chose, l’avoir fait en est une autre.

 

BRESIL

Jacaré, Joao Pessoa, Olinda ont grandement confirmé ce que j’ai pu formuler du Brésil dans mon carnet n° 6.

Joao Pessoa est une grande ville dont le cœur historique est très, très loin d’égaler celui de Salvador. Ici comme ailleurs, et c’est un vrai point commun à toutes les villes, les églises sont partout en très grand nombre. Les très hauts immeubles, aussi d’ailleurs.

Loin de tout, le « village » de Jacaré se résume à une seule et unique rue qui ne respire ni l’aisance financière ni le confort. Ex village de pêcheurs, c’est un coin de campagne en bordure de fleuve où l’on retrouve les charrettes tirées par des chevaux ou des hommes, le vélo comme moyen de déplacement et de transport, les petites motos enfourchées parfois par trois ou quatre personnes, un train antédiluvien (mais bien décoré) qui fonctionne ou non. Un tout autre contexte, un tout autre Brésil que celui qui vit et s’affiche sur les magnifiques plages océaniques. Sur celles-ci, surfeurs et kitesurfers comme on en voit partout en Europe. La seule « attraction » est culturelle… le Boléro de Ravel en live, chaque soir, à deux cents mètres de la marina.

Les supermarchés sont ouverts sept jours sur sept, sans interruption, avec une grande amplitude horaire. Pas de pièce pour prendre les caddys, ils sont librement à disposition et… bien rangés. La plupart du temps, une personne vous aide à ranger et transporter vos achats depuis la caisse. Pour les allergiques aux sachets plastiques, mieux vaut passer son chemin, la crise cardiaque guète.

Lors de mes balades et courses en vélos, j’ai dégusté presque quotidiennement un jus frais de coco vert (voir portraits). Doux et légèrement sucré, vraiment excellent (0,35 €). Une partie non négligeable des cyclistes de ville porte des casques. Un nombre beaucoup plus important de femmes veille à leur ligne ce qui est évidemment fort agréable à l’œil. Une toute autre impression qu’à Salvador. Étonnant mais vrai (Daniel me l’avait dit).

Et puis… Olinda. Classée au patrimoine mondial, son nom viendrait du cri poussé par le capitaine Duarte Coehlo quand il la « découvrit » au XVIème siècle : « O linda ! » (Oh la Belle !) Eh bien oui, la Belle. Le cœur historique est assez étendu. Toutes pavées, les rues et ruelles sont bordées de maisons basses ou à un étage dont les façades sont très colorées. L’ensemble est très bien entretenu. Pas d’extravagance, rien de grandiose mais une ambiance feutrée, de la couleur, de la musique, de la tranquillité. Une sorte de havre de paix. Une vraie personnalité, un vrai cachet. J’ai assisté, de l’extérieur ou à l’intérieur, à plusieurs cérémonies religieuses. La foi, les femmes et hommes d’église, les pratiquants sont ici bien vivants et en nombre. J’ai eu la chance d’être logée dans une « pousada » (sorte de bed and breakfast) située en limite immédiate de la ville ancienne. Jardin, arbres et plantes, piscine, petit déjeuner pantagruélique… pour 20 € par nuit. Je me suis également offert une séance de coiffure chez Edson’Art. Toujours sympa.

En termes de langue, du portugais, encore du portugais et… du portugais (rien d’autre !).

Pour finir, je redis ici combien j’ai trouvé les brésiliens accueillants et chaleureux, combien ce pays, dont je n’ai fait qu’entrevoir une infime partie, me parait beau, combien il mériterait une attention plus longue et plus diversifiée. Un bémol de taille cependant, celui de l’insécurité permanente qui en limite grandement l’accès et la découverte par la mer. Bien dommage.

Le Brésil, avec ses côtés positifs et ceux qui le sont moins, est une étape que je suis extrêmement heureux d’avoir faite, caïpirinha et carnaval compris.

 

PLAISIRS DE LA RENCONTRE, PORTRAITS

Parce que les rencontres sont une composante majeure du voyage…

Pascal, navigateur au long cours

Pascal, fin de quarantaine je pense, navigue depuis sept ans en solitaire (sa femme travaille encore en France). Ne supportant plus son travail dans une boite de transport routier, il a choisi l’option de la navigation pour poursuivre sa vie dans de meilleures conditions. Il effectue à l’heure actuelle son troisième tour d’Atlantique. Il connait bien Jacaré et ses environs. Il m’accompagnera à la Marine à Joao Pessoa où je devais effectuer l’entrée dans l’État de Paraiba où je me trouve désormais (le Brésil est un État fédéral). Je l’ai interrogé, carte en main, sur la suite de mon parcours, lieux à voir, lieux à éviter… et ai attentivement noté ses recommandations.

X navigateur, plongeur professionnel à… Mayotte

Pardon à lui, son prénom m’échappe. La trentaine sympathique. Beau garçon comme diraient les filles, yeux bleus superbes. Un regard franc et direct. A Salvador en même temps que moi, il est lui aussi remonté à Jacaré en solo. C’est à Jacaré qu’il m’a dit vivre et travailler à Mayotte. Nous avons évoqué ce territoire, ses beautés, ses affres, nos connaissances communes dont le monde de la plongée…

Paolo, réparateur de vélo

Mes chambres à air de vélo ont décidé de me lâcher simultanément. Après plusieurs tentatives de réparation infructueuses (trop de petits trous) et faute d’avoir trouvé des chambres à air identiques aux miennes à acheter, je lui ai rendu visite. Paolo est un gaillard fin et musclé dans la trentaine. Un visage taillé à la serpe. Son atelier est une pièce d’environ quatre mètres sur quatre, ouverte sur l’extérieur. Il m’a accueilli avec beaucoup de gentillesse. Une fois ma demande comprise, en un tour de main, avec des gestes précis et rapides, il a démonté les pneus, changé les chambres (un autre modèle faisant l’affaire) et remonté le tout… Impressionnant. Il m’a demandé 70 reals (18 €) pour son travail, les deux chambres à air installées et deux chambres à air en complément. Je lui ai donné le seul billet de 100 réals dont je disposais en lui indiquant que je ne voulais pas de monnaie. Du coup, il a attrapé une troisième chambre à air qu’il m’a offerte avec un grand sourire. « C’est mon cadeau ! » m’a-t-il dit. Voir photo.

Joao, vendeur de coco

Dans mes balades quasi quotidiennes à vélo, sur le chemin du retour, j’ai pris l’habitude de m’arrêter boire un jus de « coco vert gelado » (frais parce que mis à tremper dans la glace). Joao, la trentaine solide, taille la partie verte du coco avec une dextérité tout à fait impressionnante. Une fois la partie supérieure mise à nue, il fait un trou en triangle avec la pointe de la machette de façon à introduire la sacro-sainte paille plastique. Le jus est doux et fruité, un régal.

 

 

PORTS – MARINAS – MOUILLAGES

TERMINAL NAUTICO – SALVADOR DE BAHIA

  • Pourquoi y aller :

Salvador est un des points d’entrée au Brésil (État de Bahia) : Marine, Douanes, immigration y sont présents. Situé en plein cœur de ville, l’abri est sûr et gardé. Eau, électricité, Wifi. Dominique, e responsable est français et donc… parle notre langue et distribue toute informations utiles. La ville historique est superbe. La baie de Bahia, magnifique. Son carnaval participatif !!!

  • Limites / restrictions :

L’avitaillement n’est pas aisé, tout est assez loin et le déplacement en taxi s’impose. L’insécurité est assez à très présente.

  • Au final :

C’est une étape idéale en arrivée de transatlantique. Infrastructures et accueil de qualité en français. Ville historique superbe. Baie de Bahia (sauf Paraguaçu dangereux). 21 € / jour pour 13,70 m. Prix réduit au mois.

 

ITAPARICA – BAIE DE BAHIA

  • Pourquoi y aller :

Abri sûr au ponton comme au mouillage, village et ile très sympas, restaurants et bars, plages, balades à pied et en vélo, baignades en eaux claires et chaudes… douceur de vivre. On débarque au ponton avec l’annexe sans frais.

  • Limites / restrictions :

Avitaillement sur place très limité.

  • Au final :

Mon étape bucolique idéale.  Infrastructures et accueil de qualité. Plusieurs bateaux français à demeure (échanges, conseils…). Village superbe et sympa. Gratuit au mouillage. 21 € / jour pour 13,70 m au ponton.

 

JACARÉ MARINA VILLAGE (10 KM AU NORD DE JOAO PESSOA)

  • Pourquoi y aller :

Abri sûr au ponton comme au mouillage (vase stable), coin de rivière sympa ; locaux rustiques mais sympas, restaurant (on mange bien), bar, laverie ; possibilité de stocker son bateau au sec, de caréner, de faire des réparations ; équipe franco-belge bilingue (bons conseils y compris sur la navigation, contacts avec les brésiliens) ; petite cantine et petite épicerie dans la rue principale ; du poisson à acheter sur place… Boléro de Ravel en live tous les soirs à trois cents mètres (saxophone, violon), sympa ; Cabadelo au nord (douanes et police), Joao Pessoa au sud (Marine), accès en train quand il fonctionne, taxi sinon ; possibilité de visite d’Olinda qui vaut le coup d’œil…

  • Limites / restrictions :

Coin paumé, loin de tout, quasi rien sur place ; ville de Joao Pessoa à 10 km, quelconque ; Cabadelo, 15 km quelconque, sauf marché primeurs du samedi (facilement accessible en train quand il fonctionne, taxi sinon) ; beaucoup moins bien que Salvador et la baie de Bahia

Marina : une certaine opacité financière, prix (griffonnés sur un papier) relativement élevé à la journée, pas de facture ; toute aide payante : transport pour les papiers – 60 € pour un équipage dans la voiture 120 € si deux équipages ensemble (!), commandes de matériels (15 € par batterie, non annoncés préalablement) ; 5% de frais pour paiement par carte bancaire (je n’avais pas encore vu ça) ; Uber, fils de, 120 € l’aller-retour pour Olinda !) ; laverie payante (des vêtements se perdent sans compensation ni excuses ; prise en compte STW pas précisée ; le mécanicien recommandé par la marina est du type arnaqueur (150 € pour changer un joint à 5 €, un roulement à 10 €)… et un moteur qui une fois arrivée en Guyane ne redémarre pas (carburateur encrassé et pas nettoyé lors de l’intervention !)

  • Au final :

Un point de vue mitigé, du bon et du moins bon, un goût légèrement amer. J’y ai passé trois semaines dont plus de la moitié au mouillage, dans l’attente de mes nouvelles batteries. Trois ou quatre jours m’auraient suffi sinon. La marina n’est pas une entité philanthropique mais bien une entreprise commerciale (ce dont personne ne doute) où tout se paie au prix fort (38 € / jour pour 13,70 m, 20 € par jour si une semaine ou plus). Il m’a été appliqué le prix de journée correspondant à la semaine pour les trois jours en plus de la semaine passés au ponton (prise en compte appartenance STW, j’imagine).

D’autres pontons appartenant à d’autres marinas existent au même endroit, beaucoup moins chers semble-t-il…

 

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